Alcool, pour faire taire mes pensées
Je crois que je fais de l’anxiété depuis que je suis née. J’ai toujours été quelqu’un qui s’inquiétait pour tout. Du plus jeune âge que je me rappelle, je demandais déjà à mes parents si c'était correct que je prenne tel ou tel article, car je connaissais la valeur de l'argent. J'ai toujours été quelqu'un qui gère les situations et je sais que j'ai les capacités pour être une «leader» naturelle: j'écoute, j'aide et j'agis pour les autres. Cependant, je faisais toujours passer tout ce qui était autour de moi avant moi-même: ma famille, mes amis, mes problèmes sociaux et financiers. Mais où était le temps où je pensais à mon bien-être? Il n’y en a pas eu ou, du moins, très peu. J'ai toujours eu ces démons dans mon placard que je voulais tellement refouler en pensant même un jour qu'ils n'existaient plus. Mais, depuis quelques années, tout cela a été exacerbé par l’alcool. Je ne voulais plus entendre mes pensées, les voix dans ma tête qui me disaient ce que je ne voulais pas reconnaître. Je suis particulièrement touchée par ce texte, car j'ai été diagnostiquée depuis quelques jours d'un trouble d'anxiété généralisée (ci-après « TAG »).
Sais-tu quand, où et comment j’ai commencé à boire pour faire taire mes pensées? Non? Et bien, en fait, moi non plus. Je crois que ça s'installe insidieusement dans ta tête, puis dans ta vie en général. Tu as eu une mauvaise journée? Bon, c’est pas grave, tu as ton petit verre de vin qui t'attend à la maison. Après deux verres, trois verres, ah la bouteille, pourquoi pas? Ta semaine de job est finie, ou tu as enfin eu cette promotion, ou bien tu as une bonne nouvelle à célébrer avec tes amis? Une bière, deux bières, un «six pack», et pourquoi pas une douze? Tu sais, ce moment d’ivresse où tu ne penses juste plus à rien? Où tu penses passer une belle soirée? J’ai vécu que de ça pendant un certain temps. Juste pour être ''happy'', ne plus me soucier de rien. Cependant, la chute y est toujours; celle où tu te retrouves encerclé(e) par ces idées ou ces émotions que tu voulais à tout prix refouler. Elles te bercent pendant ta décente. Tu commences à vaciller, tu sais que plus rien ne va, tu as les larmes aux yeux, tu veux seulement boire jusqu'à temps de t'effondrer saoul(e) mort(e), pour ne pas endurer la chute. Mais tu te réveilles quelques heures plus tard, car le sevrage est déjà là. Tu voudrais dormir ta vie, mais tu n'y arrives pas. Tes pensées reviennent et te grugent de l'intérieur.
Tu sais, bien que je viens d’être diagnostiquée TAG, ma psychiatre ne peut et ne veut pas augmenter mes stabilisateurs d’humeur puisqu'à chaque fois que je bois, ça fait en sorte que toute ma sérotonine (mon « pep ») que j’avais accumulée grâce à celle-ci, disparaît. Elle m'a aussi indiqué que le sevrage d’alcool est le seul dont on peut mourir. En effet, cela arrive si la personne ne prend pas de traitement pour les alcoolo-dépendants. De plus, lors d'un sevrage brutal, on est plus facilement exposé à des séquelles mentales pour le restant de notre vie. Je suis au pied du mur. J’arrive à fonctionner, travailler et avoir une vie sociale, mais je sais que maintenant, et je ne me le cache plus, je suis alcoolique.
Si tu te vois dans ce texte, sache qu’il n’est jamais trop tard. N’aie pas honte d'en parler avec des personnes de confiance: à ta famille, tes amis ou un professionnel de la santé. Si tu n’es pas à l'aise d’en discuter avec ton entourage, il y a toujours les groupes de soutien tels que les Alcooliques Anonymes ainsi que les Narcotiques Anonymes. Bien que nous soyons en temps de pandémie, plusieurs réunions se font tout de même en présentiel ou bien par visioconférence. Tu peux aussi vérifier s’il y a des thérapies dans ton coin qui pourraient t’aider. Pour ma part, je vais appeler au CLSC de ma ville et vérifier si je peux avoir un suivi externe avec un intervenant. Je ne peux plus reculer, je le fais pour moi. Alors, fais-le donc pour toi!!
Marie-Ève B.
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