La dépression joyeuse
Selon le Larousse, la dépression est un « état pathologique marqué par une tristesse avec douleur morale, une perte de l'estime de soi, un ralentissement psychomoteur. » Avec le temps, les gens ont associé une dépression à l’image d’une personne toujours couchée qui n’a pas pris sa douche depuis des jours et qui est incapable de sortir de chez soi. Ne te méprends pas, il y en a qui sont comme ça, moi-même, je l’ai été il y a quelques années. Mon état était si grave que je n’avais pas pris de douche durant un mois. Je sais, c’est dégueulasse, mais j’en étais physiquement incapable. Juste l’idée de me lever me demandait un effort surhumain. Je ne mangeais pas, je ne me lavais pas. Je restais dans mon lit à dormir ou écouter des émissions sur mon cellulaire, même pas sur mon ordi, je n’avais pas la force de l’ouvrir.
Néanmoins, il existe aussi une autre facette de la dépression, celle que j’appelle « la dépression joyeuse ». Je sais que ça semble contradictoire, mais tu vas comprendre.
Il existe des dépressions qui sont tellement profondes en toi que tu arrives à fonctionner malgré tout. Elle devient un peu une partie de ta personnalité à temps plein. Elle est là, elle t’agresse souvent, mais la plupart du temps, tu arrives à te lever, à manger, prendre ta douche, faire ton ménage. J’irai même à dire que tu peux aller voir des amis sans problème. Ça ne fait pas de toi quelqu’un de moins dépressif ou guéri. Si seulement… Non, car la dépression s’est tellement ancrée qu’elle se faufile dans tes pensées, dans tes doutes. Elle t’isole le soir quand vient le temps de dormir, même si tu as passé une belle journée, même si tu as eu le sourire collé au visage devant tes amis et que tes draps sentent le propre.
Car la dépression joyeuse, c’est ça. C’est avoir des moments normaux, vivre des moments de bonheur, mais ne jamais oublier la tristesse et la mélancolie qui se loge dans ton cœur, bien installé dans ta poitrine. Elle ne te quitte jamais, même si aux yeux des autres, tu parais si bien, si heureux.se.
La santé mentale a toujours été difficile à comprendre par tous. C’est normal, car tant qu'on ne le vit pas, on n'est pas totalement apte à en comprendre toutes les facettes. Ainsi, il se peut qu’on te sorte la phrase « pourtant tu n’as pas l’air déprimé.e ». Un sentiment amer peut faire son chemin jusqu’à tes lèvres pour adresser un sourire jaune, celui qu’on fait quand on a envie de répliquer quelque chose qui n’ajoutera rien à la conversation, mais qui nous ferait tellement de bien. Du genre : « Ah ? Il faudrait que je pleure devant toi pour avoir l’air déprimé.e ? » ou encore, ma préférée « Veux-tu ma tête deux minutes pour vérifier ? ». Ça ne ferait que créer un malaise...
Car même si on fait notre ménage, on pleure. Même si on se lave, on fait des crises de panique. Même si on prend un verre avec des amis, on se demande où est notre place dans cette société. Chaque petit geste demande le double d’énergie, puisqu'il faut combattre les pensées qui polluent notre tête. Ainsi, après avoir fait la vaisselle pendant quinze minutes, tu dois prendre une pause d’une heure pour recharger ta batterie. C’est souvent lié à l’état dépressif. Ne laisse jamais quelqu’un te dire que tu n’es pas en dépression, car tu as fait ta vaisselle. La personne n’a pas conscience de toute l’énergie que ça t’a pris.
N’oubliez jamais les dernières photos de gens qui se sont suicidés. Leur sourire, leur joie, leur présence dans des événements. La dépression ne se voit pas toujours. Restez vigilants lorsque vous posez un commentaire à quelqu’un de potentiellement déprimé. Il/elle combat à sa façon.
Jessica
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